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Les Chroniques du Mérovingien
9 juillet 2005

SCREAM 3

scream3001Bienvenue dans le dernier acte. Le succès des deux premiers volets de Scream ne pouvait qu'entraîner la mise en route d'un nouveau chapitre, le final ce coup-ci. Il était temps de boucler la boucle, et si possible en beauté, en faisant de la plus populaire du neo-slasher une trilogie luxueuse et habile dans son mélange du premier et du second degré. Le budget a enflé (40 millions, soit autant que les 2 premiers réunis), la sortie a été planifiée suffisamment tard pour laisser le temps de soigner le film (alors que moins d'un an séparait les 2 premiers opus)...

Seulement voilà, depuis Scream 2, les choses ont un peu changé. Kevin Williamson est devenu un scénariste à l'emploi du temps trop chargé (Mrs. Tingle, Wastland...) et ne pouvait pas rempiler pour achever ce qu'il avait commencer. Exit son cynisme envers le cinéma d'horreur et bonjour à l'humour bon enfant d'Ehren Krueger, scénariste au nom qui le prédisposait à bosser avec le papa de Freddy. En résulte un ton plus léger qui fait de Scream 3 un film décontracté et à l'humour bon enfant, moins référentiel que par le passé. Mais il y a aussi du changement chez Wes Craven. Le réalisateur estampillé « film d'horreur » n'a jamais caché que s'il réalisait les suite du premier Scream, c'était pour assurer la cohérence entre les films mais avant tout un moyen de négocier avec les producteurs son incursion dans un autre registre. Le réalisateur a en effet monnayé un contrat pour 3 films avec le studio dont un qui ne serait pas un film d'horreur. Entre Scream 2 et 3, Craven est donc partis filmer Musique au Cœur, un mélo sirupeux avec la reine du Kleenex Meryl Streep. Il est content d'avoir pu enfin sortir de la case dans laquelle il s'était enfermé.
Mais surtout, depuis le précédent film, la nouvelle vague du slasher a déferlé, avec son lot de suite, de copie, de plagiat de copies... Entre les décolletés de Jennifer Love, les Urban Legend et australien Cut, les psychokillers masqués sont revenus en force en pressant le citron moisis jusqu'à la dernière goûte. Les spectateurs se sont un peu lassés d'un genre redevenu moribond. Ainsi, de la même manière que Scream avait ressuscité un genre tombé dans l'oubli, Scream 3 va mettre un point d'honneur à le réenterrer.

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Le chapitre final prend donc la forme d'une ultime réunion de famille et dont l'intérêt pour le spectateur réside surtout à découvrir le devenir de chacun. En effet, c'est bien l'attachement aux personnages qui nous tient en haleine, ainsi que la perspective que chacun est susceptibles de mourir en cours de route. On est ainsi ravis de retrouver Randy lors d'une vidéo où il nous expose les règles d'une trilogie, ravis de revoir en guest le père de billy et Mr et Md Prescott. Le doute qu'un de nos chouchous soit éliminé en cours de route suffit à nous faire frémir de bout en bout (surtout que c'est Cotton qui y passe dans le traditionnel pré-générique). La famille Scream se retrouve pour un dernier tour de piste et une certaine émotion se dégage des dernières minutes du film (la scène finale entre Dewey et Gale est particulièrement touchante compte tenu du fait que David Arquette et Courteney Cox se sont mariés juste avant le tournage).
Le moteur même de l'action a d'ailleurs évolué. Le film étant une conclusion, les enjeux ont un peu changé. La question du « mais qui es donc l'assassin », bien que toujours présente, à laissé d'avantage de place au mobile du tueur, et plus particulièrement au secret qui entoure Maureen Prescott. Une façon de revenir aux origines de la saga et d'y apporter un éclairage nouveau. Mieux, le dénouement, certes relativement prévisible, achève après Scream 2 de faire de la trilogie un saop de l'horreur, une grand saga familiale avec des coups de couteau.
On regrettera tout de même que seule Sidney (et dans une moindre mesure Cotton, bien qu'il disparaisse bien vite) ait bénéficié d'une vraie profondeur psychologique, là où Dewey et Gale font du surplace complet. Traumatisée par les précédents drames de sa vie, elle vit recluse et tente d'exorciser ses peurs dans un travail d'assistance téléphonique pour adolescents fragiles.

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Son évolution en femme forte la conduira à accepter la réalité de sa vie, et en ce sens, délocaliser l'action du film à Hollywood se révèle être un choix plus que judicieux. Sidney tente de disparaître, fuit les nouveaux meurtres (voir comment elle zappe les infos à la télé) mais se retrouve confrontée à une réalité qui la hante et la poursuit. En revenant sur les lieux du drame, en revisitant son passé qui a pris la forme d'une grande fiction commerciale, elle reprend sa place et ne vit plus sa vie à travers le cinéma. Une des meilleurs scène du film (peut être même la meilleure) la verra poursuivis par l'assassin dans une reconstitution de sa maison à Woodsboro et revivre à l'identique l'agression qu'elle avait subit plusieurs années auparavant, à la différence prêt que sa maison est devenu un plateau de tournage plein de faux semblant (du style la chambre qui n'est plus à l'étage et donne sur le vide). Au détour d'une conversation avec l'inspecteur Kincaid, elle avoue que son film d'horreur préféré et sa vie, et le plan final du film est un magnifique pied de nez aux éternels retours des boogeyman, avec une porte ouverte... à aucune suite.
Le jeu de va et viens entre réalité et fiction est poussé à bout avec les clones de chaque héros, qui sert souvent de réceptacle aux peurs de chacun face à la mort. En tuant le comédien tenant le rôle de Dewey, cela ne nous renvoie-t-il pas à une mort prochaine du flic benêt ? Le tournage de Stab 3 n'évoquerait-il pas la fin de films se nourrissants de fictions et donc les membres du casting sont voués à être massacré,
perforé et écorchés ? En somme, Scream 3 n'est-il pas en train de tuer consciemment tout ce sur quoi il repose, comme pour tourner la page une bonne fois pour toute ? Ce ne serait guère étonnant car certaines victimes deviennent pour l'occasion des archétypes de bimbos blondes à gros seins, le début du film fait directement échos à la parodie de Scream qu'était Stab (le plan sur la serviette qui tombe par terre) et même Randy avoue avoir perdu sa virginité, trouvant ainsi une raison à sa mort. Cela nous vaut en tout cas, quelques très bons moments, à commencer par toutes les séquences entre Gail et sa doublure Jennifer, véritable clonage de pouffes savoureux.

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Wes Craven profite également du cadre de Scream 3 pour régler quelques comptes avec les studios, que ce soit à travers le personnage de Roman, réalisateur que les studios obligent à réaliser un film d'horreur avant tout, où encore les producteurs au début qui tente de nuancer la violence de Stab 3 par peur de relancer le débat sur la violence au ciné. En bon Scream, le chapitre final contient également son lot d'apparitions clin d'œil mais qui marquent aussi une rupture après les précédent opus. Déjà, le casting principal n'est plus composé de vedettes du petit écran mais d'acteurs d'horizons divers, tel Parkey Posey, égérie du cinéma indépendant où encore Lance Henriksen, star du cinéma fantastique pour ses rôles entre autres dans Aliens et Millénium. Mais en ce qui concerne les guests, on relève les personnages de Silent Bob et Jay, héros des films de Kevin Smith qui passe rapidement, souvis par Wes Craven en touriste. Roger Corman, pape du gore Troma interprète rapidement un producteur de films gore. Mais la Palme de la guest de luxe revient à Carrie Fisher (oui, oui, la Princesse Leia de Star Wars, c'est elle) en archivistes aigris que la vraie Carrie Fishet lui est piquer le rôle en couchant avec Georges Lucas !

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Ces bons moments sont les signes évidents de l'orientation du chapitre final, à l'esprit bon enfant. D'un autre côté, cet humour efficace s'éloigne parfois trop de l'essence même de Scream, à savoir le mélange humour/horreur. A force d'accessoires du crime et de gags visuels balourds (le coup du black qui tombe parce que le tueur tire sur le tapis : c'est Bugs Bunny ????), la peur devient un élément souvent trop oublié. Alors bien sûr, il est appréciable que le scénario tente de se renouveler en délocalisant l'action et en multipliant les nouveautés (Sidney quasi-absente de la première moitié du film, le tournage du film, la mécanique du suspens basé sur le mobile plutôt que l'identité du tueur). Néanmoins, certains points ne manquent pas de décevoir, tel le concept du film dans le film parfois assez mal exploité. Par exemple, la scène d'introduction est de très loin la moins convaincante des trois car ne portant aucune réflexion particulière sur le cinéma. Là où un meurtre lors du tournage d'une scène de meurtre aurait pu être très marquant (une vraie lame remplaçant le couteau factice), on doit se contenter d'une banale agression entrecoupée de plans de voiture fonçant à vive allure. Idem pour le meurtre de Sarah qui partait d'une très bonne idée (la victime se réfugie dans l'entrepôt des accessoires de Stab 3 et se cache au milieu des costumes) mais qui au final n'est absolument pas exploité. On pourra également s'agacer de la non-violence des meurtres incroyablement soft (à peine 2 plans saignant, le reste de la violence visuelle se résumant à des effets de montages rapides !). Enfin, on pourra regretter que le scénario est été écris en cours de tournage, empêchant de développer suffisamment les nouveaux personnages auxquels on a parfois du mal à s'attacher et grippant un peu la mécanique de la suspicion.

En somme, Wes Craven ne semble s'investir beaucoup dans la mise en scène que par le passé et joue moins avec l'audience qu'auparavant. Son film demeure néanmoins emballé avec efficacité (l'explosion est plutôt jouissive dans le genre !) et contient suffisamment des nouveautés fraîches qui renouvellent la série pour emporter l'adhésion. Le plaisir du spectateur à retrouver des personnages auxquels il est attaché fait le reste et permet à la trilogie Scream de s'achever avec les honneurs.

NOTE : 4/6

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