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Les Chroniques du Mérovingien
17 août 2005

MATRIX REVOLUTIONS

matrix301Matrix Reloaded a clairement faussé toute la donne sur l'ensemble de la saga. Déconcertés par les dialogues brumeux, les choix scénaristiques déstabilisant (Néo fait partie du programme de la Matrice !!) et les scènes d'action jeux vidéo, les spectateurs moyens qui avaient tant vantés les louanges du premiers opus – sans même l'avoir compris complètement- se sont retrouvés dans l'embarras. La trilogie Matrix serait-elle devenu une machine commerciale sans queue ni tête ? Tout ce qui avait été acquis dans le premier opus étant remis en cause dans le second, l'acte final allait-il offrir une conclusion cohérente ? Toutes les réponses étaient-elles au bout du chemin de Revolutions ?


Revolution... Un mot aux sens multiples et qui ne ment pas un instant que la teneur du métrage. Le troisième volet de la trilogie va littéralement bouleverser les certitudes et va retourner l'esprit des spectateurs qui s'attendaient à voir les réponses leur tomber dans le bec. Le dernier Matrix se révèle en vérité dans la continuité des deux premiers, transcendant chaque aspect de la saga pour les tirer vers le haut. Ceux qui avaient déclaré forfait à Reloaded risquent de tirer la gueule devant Revolutions. L'ultime Matrix est un film qui se mérite tout autant que les précédents, si ce n'est plus, tant les frères Wachowski mettent un point d'honneur à balancer leurs dernières cartouches référentielles, chargeant à ras bord une œuvre toujours plus dense et complexe. Par quoi commencer alors ? Le contenu politique ? Allons-y alors.
Le premier film évoquait clairement Ronald Reagan, le second comparait Bush à Hitler (voir les images dans la salle de l'Architecte, doublées à une réplique lourde de sens)... Ce troisième volet met un point d'honneur à glorifier le chaos et le changement de pouvoir. Smith symbolise l'uniformisation, Néo le changement. Dans cette Matrix où désormais tous les individus sont semblables, l'Elu va semer le trouble, tout détruire pour mieux recommencer. Message subversif. Les Wachowski se contre foutent de la bienséance et mettent un point d'honneur à encenser l'anarchie, offrant ainsi un admirable message de tolérance dans un film pété de thunes. Rappelez-vous l'invitation à la partouze lors de la Rave de Zion... Ici, le sexe extrême se retrouve dans les combinaisons de cuir et la moiteur du Club de l'Enfer où le vice règne en maître (que de couples sadomaso et gays !). Les héros passent leur temps à se mettre sur la gueule sans en souffrir, prenant plus de plaisir à transcender leur chair et à les déformer qu'à saigner.

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Sous ses apparences commerciales, la trilogie distille un vrai message anti-conventionnel surprenant. La Révolution aurait-elle lieu seulement là, dans le travestissement subversif d'une grosse production qui va jusqu'à décrire les humains comme une secte (le discours de Morpheus, bien moins premier degré que certains ne veulent bien le dire) ? Du tout ! La Révolution a surtout lieu au niveau narratif. La prise de risque de Reloaded est ici poursuivie dès les premières minutes qui laisseront les moins attentifs sur le carreau, exigeant un bagage intellectuel important. Concrètement, où en sommes nous ? Les Sentinelles sont sur le point d'attaquer Zion, Néo est dans le coma, à côté de Bane, réceptacle de chair abritant en fait Smith qui a piraté cet homme machine ( ceux qui n'ont pas saisis ce concept seront prié de revoir Ghost in the Shell). Néo se réveille dans une gare qui a pour nom Mobil Ab. Mobil, anagramme de Limbo, les limbes. Les limbes étant l'endroit où les Justes attendaient la venue du Christ, on peut en déduire que les individus que rencontre Néo sont des programmes au rôle important. En effet, comme pour Smith, ces programmes ont développé un libre arbitre qui les rend dangereux pour la Matrice. Ils ne répondent plus à leur fonction et surtout, ils ont donné naissance à une petite fille, Sati, qui n'a aucune utilité dans la Matrice car n'étant pas un programme destiné à une fonction particulière. Ce qui ne signifie nullement que Sati ne sert à rien. Car si elle n'a pas été conçue par la Matrice, celle-ci n'a guère de contrôle sur elle, comme viendra l'annoncer la conclusion déstabilisante. Alors qui es Sati ? La solution est assez simple. Il faut pour comprendre se remémorer que Néo est le 6ème Elu. Or, le père de Sati s'appelle Rama, soit le nom de la 7ème incarnation du Dieu Vishnu. Le 7, un chiffre biblique qui fait indirectement de Sati le 7ème Elu.

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A n'en pas douter, Matrix Revolutions puisse directement son inspiration dans le bouddhisme et le taoïsme, en témoigne le générique de début présentant la Source comme une lumière divine d'où viendra l'illumination (une image ressemblant, et ce n'est pas un hasard, à la vision que Néo aura dans le ciel de Zéro-One). La matrice est ainsi présentée comme un équilibre du yin et du yang avec des antagonistes passant leurs temps à s'affronter pour maintenir l'équilibre de l'ensemble. Néo/Smith, bien sûr, mais aussi l'Architecte et l'Oracle. Le premier voit chez les individus un destin tout tracé alors que la seconde, qui s'apparente au Yi-King puisqu'elle offre au contraire plusieurs voies possible à emprunter, sans jamais indiquer laquelle lui semble bonne. Dans le cas de Néo et Smith, leur force sont égales et se renvoient l'une à l'autre lors du combat final apocalyptique (évoquant bien entendu du DBZ live : joie !!) où les plans d'introduction dans la ruelle se renvoient en une parfaite symétrie, jusqu'aux coups ultra violents entraînant des ondes chocs sidérantes. Il est important de noter que la séquence est accompagnée d'un chant indien issu de l'Upanisad et qui contient toute la thématique du film (avec cette phrase qui revient plusieurs fois « des Ténèbres conduit moi à la Lumière, à travers le Mensonge guide moi vers la Vérité »). Le tout parsemée d'une touche de Nietzsche et de son concept du surhomme, puisque ce magnifique morceau composé par Don Davis s'appelle « le crépuscule des Dieux », soit une référence à l'œuvre du philosophe « le Crépuscule des Idoles ».
On ne manquera pas d'évoquer le générique du film où Don Davis à baptiser son morceau final « Navras », soit « illumination ». L'illumination, c'est celle qui reçoivent les spectateur devant un tel spectacle à portée hautement spirituelle. Mais c'est aussi et surtout celle de Néo qui, après s'être fait crever les yeux, parvient toujours à voir le monde sous forme de lumière, confirmant qu'il est bien un programme puisqu'il n'est sensible qu'à l'énergie électrique pouvant également être assimilée à l'aura des machines, comme dans le plan somptueux où il reçoit la lumière d'une Sentinelle lui fonçant dessus. On ne manquera pas d'évoquer l'illumination finale, entre un Smith qui reçoit la lumière intérieure en même temps que Néo.

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Cette fin, elle semble avoir laisser bien des gens perplexes. Incompréhensible ? Nullement. Comme pour le reste de la saga, il faut savoir décrypter les références pour saisir toute l'incroyable profondeur que renferme l'œuvre. Pour cela, revenons un peu en arrière et arrêtons-nous sur le titre même de ce chapitre final. Matrix REVOLUTIONS. Si on prend la peine d'ouvrir son dico, on s'aperçoit que la Révolution a plusieurs sens. Dans le cas d'une planète, la révolution est le temps que celle-ci met à faire un tour dans son cycle avant de revenir à son point de départ. Une définition que l'on retrouve ici puisque Matrix 3 regorge de référence au premier film, comme si on revenait à l'origine de tout : le chat noir à la fin, la boîte de nuit, le plan de Néo dans la voiture allant voir l'Oracle... Comme si tout recommençait. Le temps imparti à Néo pour atteindre l'architecte n'était-il pas de 314 secondes, soit Pi, soit le cercle ? A la fin du film, n'est-ce pas une nouvelle matrice qui voit le jour ? Oui, sauf que le terme de révolution renvoie aussi signifier le changement de tout, une révolte contre un système aboutissant à un ordre nouveau. En cela, le dernier film de la trilogie est un aboutissement logique à la saga. Une nouvelle matrice voit le jour, c'est vrai, mais est-elle nécessairement identique à la précédente ? Justement non. Car la guerre entre homme et machines est terminée. Mais qui a mis fin à celle-ci ? N'oublions pas qui l'a déclenchée, cette guerre (cf : le double segment « la Seconde Renaissance » dans Animatrix). De la même manière, ce sont les machines qui y mettront fin. En effet, à la fin du film, Néo rencontre une machine créditée au générique comme le Deus Ex Machina. Dans le théâtre, le Deux Ex Machina était un personnage qui arrivait à la fin d'une pièce pour dévoiler toute la conclusion. Ici, ce Dieu des Machines annoncera à la mort de Né que « tout est accompli », exactement comme Dieu avait annoncé la mort du Christ. Il nous est ainsi révélé que Néo était effectivement un programme instauré dans la Matrice afin de mettre fin à la guerre et en permettant de contrôler les humains qui allaient mettre leur foi en lui. Le film est donc une véritable révolution de l'œuvre de Joseph Campbell qui instaurait un schéma commun à tous les grands mythes avec son héros qui refuse les épreuve (Néo), un guide spirituel (Morpheus) ect... En effet, dans Matrix, les héros ne sont pas définissables par des fonctions dans l'échiquier déployé. Ils sont tout simplement la fonction même qu'on leur a attribué (Néo sait où se trouve Machine City car il doit le savoir).

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La conclusion a tout cela ? La preuve définitive que les machines sont plus humaines que les humains, en témoigne leur visuel évoquant des animaux aquatiques, telles ces Sentinelles Pieuvres, le Deux Ex Machina proche de l'oursin ou encore le look de Zéro-One, rappelant irrémédiablement des récifs de corail. L'épilogue du film est une invitation à se débarrasser de notre chair et à partager notre esprit avec les machines dans ce nouveau monde virtuel débarrassé de ces chaînes. L'être humain ne doit plus se définir par son corps mais par l'esprit. Cet esprit étant également une chose que possèdent les intelligences artificielles ultra développées, il n'y a plus aucune distinction entre l'homme et la machine. De la guerre des Sentinelles contre Zion est née une nouvelle humanité. Ce n'est pas un hasard si la séquence d'attaque (grand moment de bourrinage où il pleut littéralement du métal) évoque des spermatozoïdes fécondant un ovule rouge.
Le plan final est une note d'espoir qui renvoie au Ragnarok Viking, œuvre littéraire narrant une lutte apocalyptique et s'achevant sur le symbole d'une petite fille et d'un Soleil annonçant une nouvelle ère. Ici, il s'agit bien sûr de Sati et du Soleil qu'elle a peint. Il est intéressant de note que les frères Wachowski ont toujours su que la trilogie s'achèverait ainsi, en témoigne l'indice laissé dans le premier Matrix : la mot Solo (Soleil) inscrit sur les murs de la station de métro où Smith et Néo se battent (Néo rencontre Sati dans une station de métro au début de Révolutions).
Ne reste désormais plus qu'à espérer que les hommes et leur nature violente ne gâche pas tout, comme viendra le rappeler l'Architecte à la fin du film (« pour qui me prend-tu ? Un humain ? »).


Avec leur épilogue fou furieux, les frères Wachowski imposent leur trilogie comme le 2001 de notre génération. Prônant les bienfaits du virtuel comme un moyen d'évasion sur notre monde où règne la violence, ils ont construit une mythologie si complexe qu'elle nécessite un solide effort de recherche et de réflexion pour déterminer toutes les ramifications. Du très grand art dans la prise de choux aérer par de bons gros moments d'action si virtuose qu'il s hissent la saga Matrix au rang de référence absolue de la SF, loin (très loin) devant Star Wars ou Terminator.


NOTE : 6/6

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Commentaires
M
Je tiens juste à préciser que la mère ce n'est pas l'oracle... "l'oracle? =>Voyons.." non la mère de la matrice c'est la femme du mérovingien. Car c'est elle qui étudie la psyché humaine..
R
Ce que je ne comprends pas c' est pourquoi est-ce qu' une nouvelle matrice voit le jour? Uniquement parce que Néo meurt?
D
! AVIS A LA POPULATION MéTALEUSE !<br /> <br /> Lors de la soirée de l'eurovision 2006, Michel Drucker et Siar ont fait des commentaires irrespecteux et stupides envers le groupe de hard rock finlandais vainqueur avec 292 points LORDI.<br /> NON ! AU NOM DU RESPECT DE TOUS, NOUS RéCLAMONS DES EXCUSES !<br /> SIGNEZ LA PéTITION AU NOM DU RESPECT ET DE L'OUVERTURE D'ESPRIT :<br /> http://www.ipetitions.com/petition/excuses_eurovisions/<br /> <br /> L'intégrale des commentaires et leur traduction in english ici :http://www.bmgfinland.com/lordiforum/viewtopic.php?t=2269<br /> <br /> MERCI
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